Dodécathlon 20.12

Après 20 ans, maintenant 12 mois, pour 12 défis un peu fous...

lundi 31 décembre 2012

Bilan final Dodécathlon 20.12

Le Dodécathlon 20.12 est maintenant terminé.  Réussi.  C'est maintenant l'heure du bilan.  J'ai eu, au fil de l'année dernière, amplement le temps de réfléchir à l'expérience particulière de cette année.  Voici donc ici, dans le désordre, les principaux commentaires que je puis faire suite à cette aventure un peu folle.
 
Thrill   
 
Un des objectifs du Dodécathlon était de me faire revivre le "thrill", l'excitation du débutant nerveux et enthousiaste sur la ligne de départ.  A ce sujet, je me rends compte de deux choses.  D'une part, il ne faut pas beaucoup de points marquants dans une année pour la rendre signifiante.  J'ai réalisé 12 défis et la plupart ont, à divers degrés, généré leur fébrilité.  Par contre, j'aurais pu ne faire que le marathon intérieur pour, au bilan de l'année, sentir que j'avais fait quelque chose de particulier en 2012.  Autrement dit, l'accumulation ne rehausse pas nécessairement la qualité.  Je dirais même qu'elle finit par l'étouffer en ce sens qu'elle en fait oublier des morceaux.  Le marathon intérieur, celui sur tapis roulant, la course nocturne de juin, le joggling de mai...que tout cela paraît loin déjà.  D'une autre année il me semble.  Je n'aurais fait qu'un des défis et je crois qu'il me serait davantage cher et dans mon coeur plus présent que ceux-là, aussitôt effacés sous le poids des suivants.  La morale est qu'il suffit de quelques défis dans une année pour lui donner son plein sens.  D'autre part, je retiens que le bagage d'expériences vient éteindre le "thrill".  Même si j'étais dans la nouveauté dans chaque défi particulier, j'étais dans la généralité connu de la course à pied.  Ce ne pouvait être, contrairement à mon attente, qu'une vague reminiscence de la fébrilité du débutant.  Je ne suis plus du tout un débutant -et plus l'année avançait, moins l'étais-je.  Du coup, je n'ai pu apprhénder les défis qu'avec le "thrill" du coureur de longue date, soit avec trop de confiance en ce que je puis faire et une trop vite lucidité de ce que seraient mes limites, pour ressentir les papillons du néophyte. 
 
Excitation populaire 
 
A ma grande surprise, les gens du milieu de la course à pied, mais tout autant ceux qui s'y connaissent peu, se sont pris d'enthousiasme pour le Dodécathlon.  Initialement, je croyais que c'était le plaisir malsain d'attendre que quelqu'un se casse la gueule.  Je dus me rendre compte que ce n'était pas ça, mais plutôt l'excitation primaire de partager une folie qui donne de la vie aux jours.  J'avais vraiment l'impression, par moments, que le feedback qui m'était donné était le même que, par exemple, mes copains de terrains de jeux avaient devant nos défis dans les modules de la cours d'école lorsque j'étais petit.  "Allez, pas game d'essayer ça... Ok, je l'essais.  Non, pas vrai !  Oh boy, coooolll, malade !"  Bref, l'égard à l'endroit du Dodécathlon était très ludique.  Et c'est parfait comme cela.  Après tout, on dit souvent qu'il ne sert à rien de faire quelque chose si ce n'est pas "l'fun".  C'est l'essence même de pourquoi la plupart des gens font les choses.  Je ne suis pas, personnellement, d'accord avec ça, mais aux yeux des gens cela a justifier le Dodécathlon. Par procuration, je leur ai donné du plaisir. 
 
C'est probablement pourquoi, aussi, 6000 différentes personnes (ou ordinateurs) ont visité ce blog durant l'année. 
 
Je dirais même que ce sont les gens qui ont donné vie au concept de Dodécathlon.  Moi, à l'automne 2011, j'ai sorti ce mot là de ma tête un peu rapidement.  Or, à mon étonnement, durant l'année, les gens se sont mis à dire des choses telles que, par exemple, "Robin fait un dodécathlon" ou "où es-tu rendu avec dans le dodécathlon".  Il était difficile de nommer rapidement autrement qu'avec le mot "dodécathlon" mon projet, mais ce qui m'a étonné fut de voir que la majuscule au nom propre était parfois, implicitement, retranchée comme pour dire dodécathlon avec une minuscule, comme un nom commun.  J'ai un peu, bizarrement, donné naissance à quelque chose: faire un dodécathlon, faire 12 défis. 
 
Je ne voudrais pas trop fort m'attribuer la paternité du concept, car ce sont les gens qui ont donné au mot son âme.  Je vais tout de même prendre cette paternité et remettre à tous le concept lui-même en balisant les quelques paramètres suivants :
 
Un dodécathlon, c'est 12 défis en un an à raison d'environ un tous les mois.  C'est 12 défis qui viennent parfaire le bagage d'un coureur en lui faisant explorer des facettes nouvelles, inconnus pour lui, de la course à pied.  Peut-être un jour quelqu'un tentera-t-il le coup, à sa façon, avec ses défis. 
 
Goût de la normalité
 
Comme on pouvait s'y attendre, j'ai maintenant le goût de faire de petites courses sur route.  Je suis inscrit au marathon de Boston en avril 2013...ce qui me paraît presque une course normale après l'année que je viens de passer.  Surtout, l'entraînement pour y arriver sera, lui, normal.  J'ai fini de compresser des entraînements préparatoires à un défi en un laps de temps exagérément court (c'est-à-dire insuffisant).
 
Défi plus logistique que défis physiques
 
Je m'attendais à ce que le rythme entre les défis soit soutenu, compact.  Je m'y attendais.  Je le confirme: la difficulté est autant d'enchaîner les défis un après l'autre que de faire chacun individuellement.  Normalement, après, par exemple, une course de 12 heures avec plus de 10 000m de dénivelé, on prend quelques temps de répis, on décante.  Eh bien non, il faut vite préparer, pour dans deux semaines, une expédition entre Montréal et Québec à la course !  Ce ne fut pas toujours facile de psychologiquement soutenir le rythme d'organisation. 
 
Rien de parfait, c'est parfois ça la réussite 
 
Je ne dirai pas ça souvent, mais le mieux est parfois l'ennemi du bien.  Généralement, je défends plutôt que le bien est l'ennemi du mieux en ce sens que se contenter de peu prive de parvenir à l'excellence.  Dans le cadre du Dodécathlon, j'ai dû reconnaitre qu'il était impossible d'avoir 100% sur tous les défis.  Bien souvent, la victoire réelle en était une incomplète.  Le meilleur exemple est contredit le marathon sur tapis roulant en février, "réussi" en 3h01 au lieu de sous 3h00.  Ce n'est pas parfait, mais c'est ok.  Si ça ne donne pas l'excellence, une somme de petits imparfaits donne la réussite. 
 
Défis difficiles autres que ceux anticipés
 
La question qui m'est le plus souvent demandé, depuis la fin du Dodécathlon il y a deux semaines, est "quel était le plus difficile ?".  La réponse est le défi dénivelé du mois de septembre...et non Montréal-Québec; et non 7 x (40x400).  En fait, le défi le plus difficile est celui pour lequel nous sommes le moins prêts physiquement et mentalement.  Lorsqu'on préfigure dans sa tête la difficulté, c'est déjà plus aisément surmonté.  A l'inverse, comme moi dans le cas des multiples ascensions requises en septembre, quand nous ne sommes qu'à moitié préparé, le défi est deux fois plus gros.  Leçon, savoir où on s'en va (même quand c'est nouveau) et se préparer correctement. 
 
Coup de coeur: Endurrun
 
Le défi que j'ai préféré, mais qui a aussi été le plus enrichissant est sans nul doute l'Endurrun en août.  Si j'avais en en retenir qu'un seul, ce serait celui-là.  Je ne répeterai pas tout ce que j'ai pu dire dans le compte-rendu du mois d'août dernier.  Je souligne seulement qu'après ma semaine en Ontario, à valeureusement compétitionner avec mes compagnons d'armes, je ne suis plus le même coureur.  J'en garde de chaleureux souvenirs et le fier sentiment d'avoir progressé comme athlète.
 
Médiatisation et support
 
Certains défis ont été faits en solo, d'autres de façon davantage publique.  Je crois que ce fut correct ainsi.  Contrairement à ce que certains pensent, faire de tous les défis un bain de foule (au sens d'être suivi avant, durant et après le défi) n'aurait pas été sain.  Je suis content de la couverture médiatique, du suivi des gens, de la participation de plusieurs en cours de route, de l'accompagnement d'amis coureurs.  Je n'en aurais pas voulu plus.  C'est assez pour moi.  Narcisse s'est noyée.  Les défis en solitaires permettent de garder la tête au-dessus de l'eau et de s'accaparer pleinement la satisfaction, de générer un dépassement personnel, en fonction du regard de soi et non des autres. 
 
À refaire ?
 
Je ne referais pas le Dodécathlon pour la seule et simple raison que c'est trop exigeant sur la vie professionnelle et familiale.  De plus, il n'y aurait aucun intérêt à refaire la même chose. Si je retiens quelque chose, cependant, c'est toute la pertinence de se garder vivant, comme individu et athlète, en se lançant à soi-même des défis pour éviter de faire du sur-place.  Un brin de folie n'est pas fou du tout. 
 
Synthèse
 
Au final, il faut retenir ceci:
- un ou deux bons gros défis personnels par année suffisent à donner son plein sens à une année
-Garder l'esprit du ti-cul dans la cours d'école est inspirant, pour soi comme pour autrui.
-Parfois, mais seulement parfois, une imperfection est nécessaire à la réussite.
-L'expérience solidifie la confiance, mais atténue la fébrilité.
-La difficulté est catalyéer par le manque de préparation physique et mentale.  Il faut savoir où on va et comment on doit s'y rendre pour y arriver, et ce, peu importe la destination.
-Quand tout le monde travaille fort, l'émulation nous force à nous dépasser aussi.
-Un peu "d'exposure" ne fait pas de tort, mais une humilité silencieuse dans la discrétion est saine.
-Se lancer des défis est sain.
-Un dodécathlon, c'est 12 nouveaux défis pour un individu, en 12 mois.
 
Moi, cette année, j'ai :
 
-fais 274 tours d'une pistre de 154 mètres en 3h19
-fais 42.2 km sur un tapis roulant en 3h01
-fais le 60m, 300m, 600m, 1000m, 1500m, 3000m et 5000m marche en un même championnat (provincial !), et ce, en deux soirs (4h).
-jogglé 5km, retro-couru 5km, couru en Obélix 5km, baby-joggé 5 km.
- couru 79 km entre le coucher et et lever du soleil.
-fais 280 x 400m en une moyenne de 1:26 en 7 jours. 
-terminé 2e des 160 km de compétitions en terrains variés de l'Endurrun International.
-monté/descendu 10 260m en un peu moins de 12h00.
-donné 1100$ à la Fondation Terry Fox encourageant la recherche contre le cancer.
-couru 293 km en 33 heures entre Montréal et Québec, étalés sur 4 jours consécutifs.
-couru 217 km en relai par équipe (Ekiden) avec des top runners de ma région, et ce, en environ 38 heures autour de la région Centre-du-Québec.
-fais 401 km en 34 heures en 7 jours, à une moyenne de 5:06/km et 65% de la VAM.
 
-par ailleurs couru, pour une troisième année consécutive, plus de 5000 km (5200 cette année).
 
Ce fut mon année.  Et la vôtre ?  Mais surtout, et la prochaine, que sera-t-elle ?
 
Merci de m'avoir accompagné, suivi, supporté, encouragé durant cette année unique, ma 20e, mais pas la dernière.
 
Eu prattein
 
Robin

vendredi 14 décembre 2012

Je suppose que la base aérobique est là !

La semaine dernière était la dernière de cours au cégep où j'enseigne.  A la maison, c'est la routine quotidienne avec deux enfants (7 et 27 mois). En matière de coaching, c'est la période des renouvellements des athlètes et le lancement de la saison intérieure de compétition.  Bref, c'était l'occasion toute appropriée pour courir 400 km en une semaine, à raison de 3 séances de 90-120 minutes chacune !
 
Je suis bien sûr ironique.  Les conditions étaient loin de parfaites.  Mon défi du mois de décembre est de ceux qu'on s'attendrait à réaliser en prenant de nombreuses siestes et, la nuit, en s'assurant de dormir comme un bébé (expression qui suggère que son inventeur n'avait pas une énorme expérience des enfants..ou qu'il ne côtoyait de bébés que de jour...).  Une des difficultés majeures fut de "caser" le défi dans  la semaine "normale" d'activités.
 
Mais c'est fait...
 
En chiffres, ça donne ça:

 
Défi 250 miles (400 km en une semaine).  Dodécathlon décembre 2012
Date Heure dép. Nb. Heures Nb. Km. Vit.moy. Km/h Vit.moy min/km Endroit/parcours %VAM
08-déc-12 7h00 2 23.52 11.76 5:06/km St-Léo/Parcours J-D (GPS) 65.52
14h10 2 25.09 12.54 4:47/km St-Léo/Parcours 12k habituel (GPS) 69.86
17h30 1 11.64 11.64 5:09/km St-Léo/improvisation (GPS) 64.85
Total Jour 1   5 60.25 12.05 4:58/km   67.13
09-déc-12 7h50 1 10.82 10.82 5:32/km St-Léo/Golf (GPS) 60.28
9h20 2 26.06 13.03 4:36/km St-Léo/Parcours habituel (GPS) 72.59
13h30 2 22.5 11.25 5:20/km St-Léo/improvisation (GPS) 62.67
Total Jour 2   5 59.38 11.88 5:03/km   66.16
10-déc-12 7h45 2 21.49 10.75 5:35/km St-Léo/Snoopette+habituel (GPS) 59.89
15h00 2 23.22 11.61 5:10/km Gymnase Drummond tapis (incl.1%) 64.68
20h45 2 25.27 12.63 4:45/km St-Léo/4 km Polycourons (GPS) 70.36
Total Jour 3   6 69.98 11.66 5:08/km   64.98
11-déc-12 9h50 2 22.82 11.41 5:15/km St-Léo/Parcours J-D (GPS) 63.57
15h25 2 24.32 12.16 4:56/km St-Léo/8 km Polycourons (GPS) 67.74
20h50 1 12.05 12.05 4:58/km St-Léo/Parcours habituel (GPS) 67.13
Total Jour 4   5 59.19 11.84 5:04/km   65.95
12-déc-12 7h40 1.5 16.69 11.13 5:23/km St-Léo/Improvisation (GPS) 62.01
15h20 1.5 17.90 11.96 5:01/km Drmd./ Parcours St-Charles (GPS) 66.63
21h00 1.5 17.85 11.92 5:02/km St-Léo/Parcours Parc Industriel (GPS) 66.41
Total Jour 5   4.5 52.44 11.65 5:09/km   64.92
13-déc-12 7h50 1.5 15.43 10.29 5:50/km St-Léo/Parcours 1.25 km Golf (GPS) 57.33
13h30 1.5 17.61 11.76 5:06/km Champlain/Parcours 2e camping (GPS) 65.52
18h00 1.5 17.38 11.61 5:10/km Champlain/Parcours 2e camping (GPS) 64.68
Total Jour 6   4.5 50.42 11.20 5:21/km   62.42
14-déc-12 9h50 1.5 18.15 12.12 4:57/km Champlain/Parcours Ile-Valdor (GPS) 67.52
14h35 1.5 18.72 12.50 4:48/km Champlain/Parcours Ile-Valdor (GPS) 69.64
18H15 1 12.60 12.60 4:45/km Champlain/Parcours dépanneur (GPS) 70.19
Total Jour 7   4 49.47 12.37 4:51/km   68.90
Total J1-7   34 401.13 11.80 5:05/km   65.73

Au final, j'ai fait 401 kilomètres en 34 heures, soit à une vitesse moyenne de 5:05/km ou, pour ceux moins familiers avec les références de coureurs, à une allure de 11.80 km/h.  J'aurais été plus vite que cela, en moyenne, n'eut été des premières séances journalières.  Je ne suis pas un coureur du matin.   Je m'en suis même plutôt bien tiré avec ces "morning runs". 
 
J'ai calculé, tout au long de la semaine, le pourcentage de ma vitesse aérobique maximale (VAM) auquel je courrais.  C'est là, selon moi, une mesure de l'effort plus juste que la vitesse en kilomètres/heure.  J'explique à partir d'un exemple.  Si j'étais un coureur de haut niveau et qu'au lieu d'une VAM à 17.95, j'en avais une de, disons, comme notre champion canadien Cameron Levins, de 23, alors je n'aurais pas fait 401 km à une vitesse moyenne de 11.80 km/h, mais plûtot 513 km à une vitesse de 15.1 km/h, et ce, pour la même durée de course et le même niveau d'effort.  A l'inverse, si je ne faisais pas le 10km en 36 minutes -et encore moins en 27 comme Levins- mais en 50 minutes (et donc avec une VAM avoisinant 13.5 km/h), alors j'aurais fait 300 km pour la même durée à la même intensité d'effort. 
 
Je pose cependant une question à tous les physiologiques lecteurs du présent blogue: si, en raison de la fatigue normale, je perds progressivement en capacités (musculaires, neuromusculaires, etc.) en cours de semaine, est-ce à dire qu'il est faux de supposer que la même distance parcourue par le même coureur -moi- à la même vitesse serait du même pourcentage de ma VAM ? Ne devrait-on pas supposer que je travaille plus fort vers la fin de la semaine qu'au début et que, en ce sens, le pourcentage de VAM correspondant à mon effort réel augmente proportionnellement ?  Vous avez compris la question ?  Si vous pouvez y répondre, j'apprécierais.  Je n'ai pas la réponse moi-même.  D'un point de vue de coach, ce genre de problème soulève des implications pratiques importantes...
 
D'un point de vue mental cette fois, je souligne que j'en avais un peu ras-le-bol de courir à vers la fin de la semaine.  Il faut aussi dire que les jambes ne sont plus, après l'année  que je viens de passer, dans leur état initial.  J'ai des douleurs partout et une certaine fatigue généralisée.  Cela est aussi vrai ou se répercute au niveau mental.  Cette semaine, j'ai vite trouvé que je courrais tout le temps.  Ce n'était pas loin de la vérité il faut dire !
 
L'autre difficulté fut la gestion de l'alimentation.  Quand tu as trois heures entre deux séances, tu ne peux pas trop manger.  Après trois jours, il était évident que je terminais les entraînements en état d'hypoglycémie légère.  Or, je ne pouvais pas manger copieusement après deux des trois séances journalières, car j'avais un autre entraînement en vue.  Bref, j'ai quand même mangé beaucoup durant la semaine, mais j'ai certainement perdu du poids (ce qui a au moins eu l'avantage de m'aider sur la vitesse alors que mon niveau d'énergie et de capacités musculaires baissaient).
 
Je suis, en bout de ligne, plutôt satisfait de la tournure de ce dernier défi du Dodécathlon.  Le résultat me plait.  J'aurais pu aller un peu lus vite dans d'autres conditions (cf. au début...) ou si l'année ne me faisait pas payer son dûe.  Puis, alors que tout allait bien au troisième entraînement journalier de la 5e journée, j'ai eu une réminiscence de blocage de genou au niveau du point d'insertion de la bandelette illio-tibiable...  Certains coureurs savent de quoi je parle, n'est-ce pas ?  Disons que j'ai ensuite dû exercer une vigilance de ce tracas qui aurait pu devenir un frein au défi (cela explique le 5:50/km au matin de la 6e journée). 
 
Si certains ont le goût de me dire "oui, mais 400km en une semaine, même à 65% de la VAM, ça reste facile, car ce n'est pas de l'intensité..."  Ma réponse: je rappelle que j'ai fait 280 fois 400m en une semaine  à une vitesse de 5km en juillet dernier.  Certains pourraient alors vouloir rétorquer: "oui, mais la difficulté, c'est d'utiliser l'intensité dans un cadre compétitif.  C'est facile de faire ou bien du volume ou bien de l'intensité séparémment..."  A ceux-là je réponds: j'ai terminé deuxième de l'Endurrun, une course sur 8 jours en 7 étapes de distances et surfaces ou distances variées où on pousse la machine à  tous les jours jusqu'à faire 160 km (excluant les échauffements...).  Bref, mon défi de décembre a pris sa place, celle qui lui revenait de plein droit dans le Dodécathlon.
 
Pourquoi, au juste, 400 km ?  Il y a plusieurs raisons, mais, au fond, durant la semaine, je me suis rendu compte de la vraie réponse: j'étais sûr de pouvoir faire 300, je suis sûr que je n'aurais pu envisager 500 sans un fort risque de ralentissement ou blessure majeurs en cours de route.  Bref, 400 km représente, au point où je suis rendu comme coureur, un objectif possible mais incertain, comme tout objectif devrait l'être... 
 
A part quelques blessures que je dois prendre le temps de soigner, je semble encore en état de courir.  J'envisage déjà, peu à peu, mon prochain défi: l'entraînement pour le marathon de Boston en avril.  Il y a des coureurs qui, tout en trouvant le projet du Dodécathlon 20.12 intéressant, on "parier" que ce serait ma dernière année de course.  Eh eh, raté !  Non seulement suis-je encore apte à courir, mais je crois plus qu'auparavant m'être approché du concept de coureur complet.
 
Je ferai cependant un bilan du Dodécathlon dans son ensemble d'ici la fin de l'année.  J' ai eu le temps d'en tirer des leçons et d'évaluer les points positifs et négatifs.  J'écrirai tout ça sur ce blogue, avant qu'il ne devienne ensuite qu'un souvenir evanescent d'une année un peu folle.  Ce sera, je crois, un texte intéressant, instructif. Vous en tirerez vous-mêmes les conclusions.  
 
J'ai donc fait 401 km en une semaine, dans des conditions de vie familiale et professionnelle peu favorables.  Vous trouvez cela fou ?  Eh bien chaque fois qu'on pense avoir fait quelque chose de "gros", on trouve quelqu'un pour nous ramener à dire que c'est finalement assez "petit".  En milieu de semaine, je lisais un paragraphe du livre Jack Daniel's Formula, du célèbre coach, où il rapportait avoir jadis connu un coureur ayant maintenu une moyenne annuelle de 450 km/sem avec, durant six semaines consécutives, un pic à 510 km !  Et là, à peine avais-je terminé  le dernier kilomètre de mon défi de décembre que je tombais sur un texte à propos de ce coureur -Larry Macon- ayant couru 689 marathons officiels, dont 139 dans la seule dernière année, et ce, tout en ayant une femme et un emploi d'avocat durant la semaine.  Ça c'est de la logistique ! 
 
Merci de m'avoir suivi en cours ou tout au long du parcours sur ce blogue.  Tel que dit plus haut, j'y mettrai un dernier texte, synthétique, d'ici quelques jours avant de tourner la page sur cette aventure.  Merci de votre support et de vos encouragements. 

lundi 3 décembre 2012

Programme: un pied devant l'autre !

Il ne reste qu'un défi au Dodécathlon 20.12: courir 400 km dans une semaine.  Rien que ça !
 
La difficulté du défi n'est pas physique, mais logistique.  Je ne peux pas m'offrir le luxe d'une semaine de congé.  Je devrai, comme d'habitude, aller travailler, coacher les Kalenjins et assurer la vie de famille avec deux jeunes enfants.  À travers ça, placer 35-40 heures de course à pied paraît un peu invraissemblable. 
 
Concrètement, voici mes séances d'entraînement prévues du 8 au 14 décembre 2012:
 
Samedi: 7h00-9h00; 12h00-14h00; 17h00-19h00
Dimanche: 8h00-11h00; 14h00-16h00; 20h00-21h00
Lundi: 8h00-10h00; 15h00-17h00; 21h00-22h00
Mardi: 7h00-9h00; 12h00-14h00; 17h30-19h30
Mercredi: 8h00-10h00; 15h00-17h00; 21h00-22h00
Jeudi: 7h00-9h00; 12h00-14h00; 17h00-19h00
Vendredi: 8h00-10h00; 13h00-15h00; 18h00-20h00
 
Il y pourrait y avoir des modifications à ce programme.  Dès que j'arrive à 57 km en une journée, je réduis la durée prévue dans les séances suivantes.  Évidemment, il y a un risque que certaines des troisièmes séances journalières soient plus longues...
 
En matière d'alimentation, la stratégie est simple: manger de petites portions, immédiatement après l'effort de préférence.
 
En matière de stratégie d'allure, c'est encore plus simple: écouter le corps en espérant qu'il dise assez souvent ou longtemps 12km/h ou même plus vite. 
 
Je m'attends à faire la majorité des entraînements sur mon parcours habituel à St-Léonard-d'Aston, avec quelques variations dépendamment d'où je serai à chaque jour.  Je tenterai de minimiser les déplacements pour sauver du temps.  De même, ne comptez pas sur moi pour prendre ma douche après chaque séance !
 
Pour l'instant, mon corps est physiquement à 6-7/10 de son top.  Ce n'est pas beaucoup, mais l'année se fait longue... 
 
Au bout du compte, le plan est quand même et toujours le même: mettre un pied devant l'autre (en s'assurant que les deux sont en suspensions durant une fraction de seconde à chaque foulée).  Ce n'est au fond que 107 km de plus que ma plus grosse semaine de course à vie (Montréal-Québec) qui n'avait pourtant que quatre jours.  C'est la moitié moins que mon volume durant le Endurrun...où j'avais cependant 160 km de grosses intensités...  Bref, objectivement, ce n'est pas tant que ça par rapport à ce que je connais déjà.  Tout sera affaire de logistique, de courage à me lever le matin, de rivalité contre le froid hivernal et d'harmonisation des différentes obligations de mon existence auxquelles s'ajoutera un surplus de course à pied dans quelques jours. 
 
Après ça ? 
 
Après ça j'écris le bilan de l'année et je prends du repos...une semaine !



mardi 20 novembre 2012

Poutine méritée !


Note: nous avions d'excellentes images vidéos de l'Ekiden, mais le fichier vidéo a des données corrompues  qui rendent tout transfert ou montage sur disque dur impossibles.  Des images photos, quoique partielles du défi, seront peut-être ajoutées dans les prochains jours.
Anthony à l'approche de Samuel lors
de l'échange entre les relais 3 et 4.
L’Ekiden du Centre-du-Québec a comme prévu commencé dans le royaume de la poutine (Drummondville) à 6h00 ce dimanche 18 novembre 2012 pour se terminer au royaume de la poutine (Warwick) à exactement 19h54 et 33 secondes, soit après un total de 13 heures 54 minutes et 33 secondes de course nécessaires pour compléter les 218 kilomètres.  Il faisait beau pour la saison, froid au départ, frisquet par la suite, mais ensoleillé en courant de journée.  
Nous avons, dans l'ordre, traversé les agglomérations suivantes:  Drummondville, Ste-Marjorique, Ste-Pie-de-Guire, St-François-du-Lac, Pierreville, Baie-du-Febvre, Nicolet, Port St-François, St-Grégoire, Ste-Angèle-de-Laval, Bécancour, Gentilly, St-Pierre-les-Becquets, Deschaillons-sur-St-Laurent, Parisville, Ste-Françoise, Villeroy, Plessisville, Princeville, Victoriaville, St-Christophe-d'Arthabaska et Warwick. Comme on dit, ça fait une trotte ! Si je me permets de nommer tous les bleds et les agglomérations traversés,c'est parce que trop souvent, au Centre-du-Québec, les gens ne connaissent pas les lieux et les limites qui composent notre région.  Pour diverses raisons, historiques et compréhensibles, je me suis au fil du temps rendu compte que la connaissance, et par le fait même la valorisation de la région et les projets régionalement rassembleurs (comme le club Kalenjins), méritaient une plus grande promotion.  Selon moi, il faut que les deux grands pôles arrêtent de se voir comme des lieux clos, fermés sur eux-mêmes (particulièrement dans le cas de Drummondville) et que l'ensemble des citoyens du territoire se créer une appartenance à cette vaste région aux contours flous.  Cela dit, le contour paraît moins flou quand on l'arpente un pas après l'autre durant une même  journée. 
Vous voulez une statistique débile et inutile ?  C'est, au pas de course, environ 150 000 foulées qu'il faut à des coureurs d'élite régionale pour en faire le tour ! 
Voici un bref compte-rendu de chacun des relais, avec ensuite un tableau synthétique des résultats de l’équipe et, enfin, des commentaires sur le défi réussi et sa postérité éventuelle, avant de conclure avec quelques mots sur l'état des choses dans le Dodécathlon lui-même.

Compte-rendu de chacun des relais (donc 10 petites histoires qui forment la grosse)

Cédric Boisvert, 6h00, 21.4 km entre le parc Woodyatt et St-Bonaventure

À 5h40, du matin précisons-le, il ne faisait pas chaud à Drummondville.  -7 degrés pour être exact.  Cédric et l’équipe de support alors composée de Marc-André Raiche, Marc-Antoine Crépeau et moi-même (Robin) sautillions sur place en attendant le départ.  Était-ce la hâte de lancer l’ekiden ou simplement le froid ?  Honnêtement, c’était le froid.   Il n’aura cependant pas falu un long laps de temps à Cédric pour se réchauffer et montrer ce dont est capable sa foulée musculaire.  A peine était-il lancé qu’il donnait le ton en matière de vitesse pour le reste de la journée.  Après 8 kilomètres, il avait déjà deux minutes d’avance sur le temps cible (15 km/h).  Toutefois, lui qui n’avait jamais couru aussi longtemps à une pareille vitesse avait pour principal obstacle la longueur de la distance et non la vitesse.  C’est finalement contre les crampes qu’il dû lutter en cours de route, le ralentissant tranquillement sans pour autant qu’il ne renonce à combattre dignement, sans rien laisser paraître, jusqu’à la fin.  En bout ligne, c’est 4 minutes que Cédric retrancha.   Une course représentant sans nul doute un dépassement de soi.   Et un très bon départ d’Ekiden.

Marc-André Raiche, 7h21, 23.3 km entre St-Bonaventure et Pierreville

 Marc-André a entendu (et vu) le message et s’est donc permis, dès le second relais, de rendre l’objectif plus que réalisable pour l’ensemble de l’équipe en pulvérisant la vitesse cible.  Après lui, nous avions un confortable coussin…  En effet, dès le départ il prenait un rythme de 3 :38 à 3 :40/km qui a non seulement rendu l’Ekiden un défi de performance, mais a considérablement gelé son pinch prenant vite les couleurs glaciales du givre automnal !  Oui, il faisait encore froid !  Il accélérera légèrement avant la fin, maintenant une allure constante, ayant peu variée jusqu’à l’arrivée.  Une course solide, rapide, d’autant plus impressionnante qu’il est un spécialiste de 800m (PB de 1 :52).

 Anthony Précourt, 8h45, 21.6 km entre Pierreville et Nicolet

Le troisième relais était –à mes yeux- le plus difficile, à tout le moins mentalement.   On pourra toujours s’illusionner en disant que certaines portions offraient un regard sur le Lac St-Pierre ou le pays de l’oie blanche, il reste que, de fait, c’est un des endroits les plus morne de la région au moment de courir : champs fréquents, accotements à l’inclinaison sévère, monotonie sans zest de nature zen.  De tout mon périple entre Montréal et Québec, c’est la portion que je garde en souvenir comme la plus subjectivement longue.  Anthony a prudemment lancé son relais à un rythme avoisinant 4 :00/km qu’il a pu tenir, même un temps avec une légère avance, jusqu’à 14 km, après quoi il a à son tour dû combattre  contre la décélération avant, tout de même, de ressentir l’excitation d’une satisfaction plaisante que je devine en entrant symboliquement sur le pont donnant accès à Nicolet, moment culminant de ce troisième relais. 

Samuel Letendre-Roux,   10h14, 18,5 km entre Nicolet  et Ste-Angèle-de-Laval 

Notre plus jeune concurrent était peut-être aussi, avant le départ, le plus nerveux.  On peut comprendre.  Bien que la distance était moindre, le chiffre 18.5 représente beaucoup de kilomètres à 15 ans, quel que soit notre vitesse, expérience ou talent.  Le soleil commençait à réchauffer l’ambiance et l’Ekiden allait déjà bon train avec 14 minutes d’avance quand Samuel, le premier relayeur en cuissard et non en culotte longue, a lancé sa portion à une vive allure, passant le premier 5 km en 18 :30. Il ralentira à peine par la suite malgré des douleurs qui, vers la fin, lui ont fait souffrir le martyre.

Robin Richard-Campeau, 11h25, 23.4 km entre Ste-Angèle-de-Laval et Gentilly    

En raison notamment de mon expérience en course en pied en général et plus particulièrement de cette portion du trajet (cf. Montréal-Québec…), j’avais le relais délicat faisant 10 km sur l’autoroute 30.  C’était aussi, a priori, le plus long relais.  Bien que l’année chargée du dodécathlon ait depuis quelques temps commencé à faire payer son dû, il était peu probable que je « perde » du temps sur l’objectif.  Et, effectivement, c’est ce qui est arrivé à mon relais, le cinquième : une course sans histoire, à une allure modérée et constante du début à la fin, quoique, comme pour tous les équipiers, chacun des kilomètres d’additionnant vers la fin était plus ardu que le précédent…  Une maigre minute fut retranchée à l’objectif en bout de ligne.

Guillaume Ouellet, 12h58, 20.8 km entre Gentilly et Deschaillons-sur-St-Laurent

Le sixième relais était, visuellement, tout le contraire de la plupart des précédents : le paysage était relativement beau.  Pour compenser cette injustice, Guillaume devait affronter, sur son parcours, trois côtes intéressantes en plus d’un léger vent de face.  Après deux ou trois kilomètres, il affirmait ceci: « j’ai pas de jambes ».   C’est vrai que son allure de départ était raisonnable, autour de 3 :50-3 :55/km.  Puis, curieusement, les jambes se sont réveillées et, le centre de gravité toujours juché haut sur les pattes sans jamais s’écraser ou osciller de haut en bas, les pas (joli « footspeed » d’ailleurs) de Guillaume l’ont mené à accéléré jusqu’à la fin pour prendre un autre 5 minutes d’avance sur l’objectif.  Dire qu’en plus il était malade (à moins que ce ne soit la course qui ait achevé son système immunitaire et réveillé le virus qui dormait ?)

Dominic Perreault, 14h16, 21.4 km entre Deschaillons-sur-St-Laurent et Villeroy   

Dominic, natif de Parisville, était en terrain connu.  Il connaissait son trajet et, à l’inverse, sur son trajet Dominic était connu.  Malgré les encouragements occasionnels aux alentours de sa municipalité, Dominic n’a pas trouvé facile sa portion de l’Ekiden.  Au début, tout semblait rouler aisément pour lui.  Prudent, légèrement sous 4 :00/km, il grugeait tranquillement l’objectif d’équipe de quelques secondes.  Il dû aussi se battre dans les derniers kilomètres pour ne pas trop ralentir.  Dans le top 3 des athlètes « crevés » après leur course, il occupe assurément une place (la première place étant disputable avec Dany, et Anthony revendiquant au moins une marche sur le podium).  Dominic retranchera quelques secondes à l’objectif de 14h30 pour l’ensemble de l’Ekiden.

Mathieu Côté-Landry, 15h41, 21.5 km entre Villeroy et presque Plessisville   

Gaillard boute-en-train et divertissant, Mathieu avait un relais tout à l’inverse de lui-même : sans piquant et endormant.  Déjà, il prenait le tasuki (le truc en tissu servant de témoin qu’on devait porter en bandouillère) au milieu de nulle part.  Sur la 265 entre des rangées d’arbres à perte de vue.  Il mit rapidement un peu d’animation dans ce huitième relais.  Changements de côté de route, comiques gesticulations et quasi-vaine tentative d’enlever des pelures en cours de route…  La fin fut cependant, aux yeux de Mathieu même, moins drôle que le début.  « Je ne suis pas un gars de demi » fut un de ses premiers commentaires à l’arrivée.   Peut-être, mais il a tout de même fait mieux que 1h20 au passage à 21.1…  De toute façon, Mathieu pouvait peiner autant que voulu vers la fin, nous avons conservé une positive image de lui…parce qu’à la fin on ne pouvait plus le voir en raison de la noirceur !

Dany Racine, 17h03, 23.4 km entre Plessisville et Victoriaville     

Dany Racine en pleine action
Au départ du 9e relais, l’avance sur l’objectif était déjà plus que confortable.  Or Dany, plus rapide coureur de l’équipée, allait en ajouter une bonne dose.  Au début, il survolait le parcours, courant dans le noir à vive allure.  En fait, jusqu’aux 3 derniers kilomètres, il pulvérisait l’objectif.  De façon intéressante cependant, Dany finira par combattre comme d’autres avant lui dans les derniers kilomètres (« to bonk » est l’expression ici appropriée).  En fait, étrangement, Dany aura été à la fois celui ayant fait les plus rapides et les plus lents kilomètres de l’Ekiden.   Il retranchera au final 10 minutes à l’objectif commun.  Fait aussi à noter : ce fut notre dernier coureur en short de la journée –et, Dany en conviendra, cela aurait dû être Dominic parce que Mathieu, culotté !, avait eu raison de garder ses tibias au chaud…

Jérémie Labbé, 18h29, 22.6 km , entre Victoriaville et Warwick

Avant le départ, Jérémie confessait s’attendre, en venant à l’Ekiden, à une petite course relax à 4 :00/km.  Sauf que si tout le monde pousse…   Il revenait donc à lui de finir la traversée centricoise en beauté.  Armée d’un convoi de six véhicules de support/sécurité, il a poursuivi le chemin sur la 116 –avec un « croche » par le centre-ville de Victo- à une allure de locomotive efficace, solide, constante comme un train qui avance sans faiblir.  Il accélérera même un peu vers la fin.  Il aurait même fait mieux, selon ses dires, si ses intestins avaient été à la hauteur de ses jambes…  Dans les derniers 500m, Marc-André, Marc-Antoine, Anthony, Dominic, Dany, sa blonde et moi étions à ses côtés ou peu derrière pour voir se clôturer le premier Ekiden de la région. 

Tableau récapitulatif de chaque relais réalisé

Relais #
Nom
Distance (km)
Chrono
Vitesse par km
Temps au demi-marathon
1
Cédric Boisvert
21.4
1h21 :10
3 :47
1h19 :55
2
Marc-André Raiche
23.3
1h24 :20
3 :37
1h16 :32
3
Anthony Précourt
21.6
1h28 :10
4 :04
1h26 :26
4
Samuel Letendre-Roux
18.5
1h11 :00
3 :47
1h23 :00*
5
Robin Richard-Campeau
23.4
1h32 :40
3 :57
1h23 :50
6
Guillaume Ouellet
20.8
1h18 :35
3 :46
1h19 :45*
7
Dominic Perreault
21.4
1h25 :00
3 :58
1h23 :52
8
Mathieu Côté-Landry
21.5
1h21 :35
3 :47
1h19 :40
9
Dany Racine
23.4
1h25 :52
3 :40
1h15 :00
10
Jérémie Labbé
22.6
1h25 :23
3 :46
1h19 :35
Total :
218 km
13h54 :33
3 :49
1h20 :40

*Temps projeté

Commentaires et analyse sur les résultats

Jérémie en voie de terminer l'ekiden du Centre-du-Québec
On voit donc, au final, que nous avons fait un kilomètre de plus que l’Hakone-Ediken. Cela en raison du mesurage initial approximatif.  C’est donc dire que nous avons pris 40 minutes de moins que le temps nécessaire pour compléter chacun des relais à un rythme de 15 km/h.  Nous avons collectivement maintenu une allure moyenne de 15.7 km/h. 

Plus impressionnant encore est selon moi le temps moyen pris pour compléter la distance du demi-marathon (21.1 km).  Non seulement s’agit-il là d’une vitesse de 1h20 :40 qui terminerait bien souvent dans les premières places des petits demi-marathons du Québec, mais surtout, il ne faut pas l’oublier, ce sont là des chronos effectués dans des conditions inhabituelles.  Premièrement, ce sont des performances à la mi-novembre au Québec.  Il faisait généralement plus froid qu’optimal pour la course à pied.  Deuxièmement, les coureurs ont tous fourni un effort en solo, contre la montre, sans concurrent.  Il va sans dire que, dans un contexte de compétition habituel, les « adversaires » aident à tirer un peu mieux de soi-même.  Troisièmement, quatre des dix relais ont été faits en partie ou en totalité dans le noir.  Généralement, ne pas bien voir où on va réduit quelque peu la vitesse.  Enfin, quatrièmement, aucun athlète du groupe n’a cherché à « peaker » pour l’Ekiden.  En fait, aucun ne s’est préparé spécialement pour cela.   Nous étions même tous dans l’après-saison, dans la période où, physiologiquement, le top de nos capacités est derrière.  Bref, plusieurs raisons portent à croire qu’il serait possible de faire encore mieux.  Par exemple, à la mi-mai, après une préparation spécifique de plusieurs semaines, sans la noirceur, avec quelques équipes concurrentes, je crois qu’il ne serait pas surprenant de voir ce chrono moyen diminuer de plus ou  moins trois minutes.  Oui, je pense qu’il serait possible, pour l’ensemble de ces coureurs, de faire le demi-marathon en un temps moyen de 1h18 :40, voire même un peu mieux.  90% des coureurs n’avaient jamais fait une pareille distance à cette vitesse.  En fait, six des 10 coureurs n’avaient jamais fait plus que 10 km en compétition –ce qui n’est surprenant compte-tenu de l’âge moyen de 21 ans.  C’est donc dire qu’avec un peu d’expérience… 

Poutine…

A la fin du périple, 7 des équipiers étaient à Warwick pour manger le repas hyper nutritif et totalement approprié qui s’imposait après une traversée du lieu officiel d’invention de la poutine au lieu officiel d’invention de la poutine !  (je laisse à ceux qui y tiennent le bonheur de trancher la controverse).  Comme dans une poutine il faut un mélange d’ingrédients (frites, sauce, fromage) pour donner le goût, notre Ekiden n’aurait pas eu la même saveur sans que nos coureurs fassent montre de diverses choses.  Classons les coureurs :

Les formules un : Dany et Marc-André, respectivement 1h15 et 1h16 au demi-marathon et à eux seuls 23 minutes de retranché à l’objectif de groupe.

Les gestionnaires : Marc-André, Jérémie, Guillaume et Robin, qui ont maintenu un rythme constant en accélérant même jusqu’à la fin au lieu de ralentir. 

Les combattants : Cédric, Anthony, Dominic, Samuel, Dany, qui après un départ contrôlé ou rapide ont dû affronter ou bien des douleurs ou bien un « mur » et se battre davantage pour persévérer dans la dernière partie de leur relais.

Les teams builders : Marc-André et Anthony qui ont accompagné et aidé durant toute la journée.

Les « entertainers » : Catégorie pour Mathieu !

Sécurité et supporters

Dès le départ de la journée, en raison des multiples virages que Cédric avait à faire durant la première moitié de son relais, nous avons informellement décidé de suivre celui-ci à basse vitesse en voiture.  Concrètement, il y avait une voiture de tête et une voiture de queue, roulant toutes deux sur les « flasheurs d’urgence ».   Ensuite, nous avons maintenu cette habitude pour chacun des coureurs…

Durant la journée, c’est un total de 8 voitures composées de coureurs, parents et amis qui se sont à un moment où un autre ajoutées au cortège des véhicules suivant les relayeurs.  Dany et Jérémie, champions à ce chapitre en raison de l’ordre de leur relais, du trafic routier sur leur chemin et de la noirceur forçant un plus grand accompagnement, ont eu droit à 6 véhicules.   Un chapelet de voitures sur les flasheurs scintillant comme des lumières de Noël !

Par ailleurs, c’est une vingtaine de personnes, majoritairement des parents et amis, qui se sont spécialement déplacés pour venir encourager un coureur durant l’Ekiden.  Nous remercions évidemment ceux-ci.

En matière de support, il faut aussi noter la rare couverture pan-régionale de l’événement.  Autant sur la rive-sud (Courrier Sud, CKBN, Le Nouvelliste), qu’à Victoriaville (La Nouvelle), qu’à Drummondville (NRJ, L’Express), les médias du coin ont fait paraître un texte sur l’événement.  Les radios ont parlé de l’avancée de notre périple en cours de journée.  Il y avait des coureurs de tous les coins de la région, qui ont parcouru toute la région, et chacun des pôles de communication médias a répondu à l’appel.  Bien que les activités d’athlétisme soient généralement plus que régionales, c’est rare que les médias de toute la région couvrent de concert les prouesses athlétiques de nos coureurs.  Nous remercions les journaux et radios de chez-nous (c’est-à-dire du Centre-du-Québec) d’avoir embarqué dans l’aventure avec curiosité et intérêt pour la faire partager à la population.

Enfin, celui qu’il ne faudrait pas négliger est Marc-Antoine (Crépeau) qui en d’autres circonstances (moins blessé pour être clair) aurait sans nul doute été un relayeur de première qualité, lui qui a fait un demi-marathon en 1h16 au printemps dernier.  Plutôt que de courir, il a été de chaque instant de l’Ekiden pour accompagner les coureurs, sécuriser le parcours en auto, donner de l’eau, texter aux médias notre progression, contacter les coureurs quant à l’évolution de l’Ekiden, etc.  Il était là à 5h40 et tout autant que nous méritant sa poutine 14 heures plus tard à la fin de la journée, faisant équipe avec Marc-André dans la logistique.  Puis, je suis le seul à avoir eu la chance de le voir, mais ça en valait la peine : le 200m de course de Marc-Antoine pour donner de l’eau à Cédric.  J’ai bien rit dans mon char en voyant Marc-Antoine se stationner à la hauteur de Cédric, sortir de l’auto et là se dire intérieurement « cr… yé loin, y va dont ben vite! » avant de décocher un sprint qui n’en finissait plus pour le rattraper.  Sans nul doute le plus rapide 200m de la journée !  Un sincère merci à Marc-Antoine qui a fait partie du 1er ekiden centricois.

Postérité et avenir

Les ekidens sont populaires au Japon depuis longtemps et depuis peu les pays européens en proposent à leurs coureurs.  Ce n’est pas chose surprenante puisqu’il y a quelque chose de naturellement attrayant dans le concept d’équipe inhérent à ces courses à relais.  Je ne serais pas le moindrement surpris de voir quelques ekidens se propager et apparaître prochainement dans le Québec.  Dans l’actuel boom de course à pied, c’est là une variante de notre sport qui marchera sans aucun doute.  Nous avons été, jusqu’à preuve du contraire, peut-être le premier ekiden de la province, à tout le moins le premier relais du genre à suivre les règles et la procédure nippone officiels.  Nous pourrons nous enorgueillir d’avoir été des pionniers, d'avoir créé un moment historique si quelqu’un, quelque part, dans le Québec, ayant vent de ce que nous avons fait, en vient à proposer un ekiden par la suite…

Pour ma part, bien que j’aimerais voir une répétition de l’Ekiden du Centre-du-Québec (faisant le tour de la région au complet en autant de kilomètres), je doute que ce ne soit envisageable.  Les relais sont tout de même assez longs et la logistique de sécurité ou de transport difficile à entendre à une plus grande échelle pour l’instant.  Puis, il était difficile de réunir des coureurs pour un pareil événement.  Évidemment, le fait que nous ayons eu, en nos rangs, 10 coureurs dans le top 20 des meilleurs de la région (et sur le lot les 7 plus rapides) rend une exacte reproduction encore plus ardue. Je ne crois pas qu’il soit possible d’envisager, pour des raisons autant physiques que d’organisation, un jour où 10 coureurs (les mêmes ou de nouveaux) feront ce que nous avons fait plus rapidement.  Ce n’est pas demain que je crois une répétition possible.  On ne sait cependant jamais…  Après tout, la même équipe, en moyenne âgée de 21 ans, serait une « dream team » à tout casser dans 6 ans.  Et si j’envisageais moi-même d’organiser ça avec la gang en 2018 ?  On verra…

Ce que j’entrevois par contre, initié par un des équipiers de la fin de semaine dernière ou quelqu’un allumé par notre aventure,  est la possible naissance d’une course du genre sous un format plus restreint.  Par exemple, un 100 km sur route entre deux villes avec 10 relayeurs ayant chacun 10 km à faire.  Un événement comme le Grand Défi, à Victoriaville, voulant se démarquer des multiples courses sur route du Québec, pourrait se distinguer de cette façon…

A refaire, il faudrait mieux prévoir un léger détail, mais oh combien crucial par moments, dans l’organisation technique de l’Ekiden : du papier.  De toilette.  De ce que j’ai subtilement pu observer, au moins 50% des coureurs de l’Ekiden aurait volontiers pris du papier de toilette avant leur départ.  Je vous épargne les détails.  Vive la course à pied !  Un monde en soi, une sous-culture avec ses réalités « propres ».  Bien sûr, les vrais coureurs, ceux qui au fil des années ont appris la parfaite technique du mouchage digital, comprendront ici tous les sous-entendus…

Dodécathlon 20.12

En terminant, je souligne que c’était pour moi le 11e défi du Dodécathlon.  Celui-là est réussi.  Sur toute la ligne.  La difficulté était de réunir ces coureurs épars et  de prier pour qu’aucun incident ne vienne anéantir le succès de l’entreprise.  J’ai personnellement dû attendre presqu'à la toute fin, quand j’ai reçu l’appel de Jérémie me disant être posté à son point de départ 25 minutes avant l’arrivée de Dany (relais #9), pour savoir que nous réussirions probablement.  Avant cela, les doutes sur la présence ponctuelle à l’endroit indiqué étaient là.  J’avoue être moi-même étonné de la réussite et de la collaboration responsable, efficace et stimulante de tous les gars de l'équipe.  Merci de votre implication qui donne le goût de croire qu’on peut encore trouver des raisons d’espérer en la fiabilité des gens et bâtir en commun quelque chose.  Et, ah oui, de me donner pour la première fois de ma vie l'occasion de voir comment Facebook et textos peuvent faire un mélange efficace et pertinent dans la gestion d'une logistique complexe (le X en moi a pour une rare fois trouvé les modalités Y un bénéfice...)

Ce 11ième défi était pour moi l’occasion d’expérimenter une autre facette jusqu’alors inconnue de la course à pied, soit le fait de courir en équipe, dépendant de l’effort commun.  Un ekiden, ce n’est pas comme une équipe de cross.  C’est plus solidaire que cela : l’atteinte de l’objectif dépend vraiment, intrinsèquement, de l’apport de tous.  Aucune substitution ou alternative n’existe.  Il faut que tous soient au rendez-vous.  Ce fut pour moi une première expérience, comme cela le fut pour les autres équipiers (qui, en plus, pour 7 d’entre eux, fut celle d’un premier demi-marathon). 

Présentement, après 11 mois d’enchaînement des défis, je suis physiquement et mentalement un peu brûlé.  Je ne sais pas si c’est l’organisation de chaque défi, le peu de répit entre chacun ou simplement l’accumulation de fatigue des entraînements et épreuves, mais je commence à avoir hâte que se conclut le Dodécathlon. 

Il reste un défi : 400 km en une semaine.  Si peu ! J’ai déjà (pas le choix) commencé à le planifier.  A pareille date l’an dernier, au moment de concevoir le projet et de séquencer l’ordre des défis, j’avais pensé mettre le 250 miles/semaine à la toute fin en me disant que s’il ne restait que cela à la fin, je n’aurais pas le choix de me dire « eh, si j’ai fait tout le reste et que je suis rendu là, pas le choix faut finir.  Après tout ce que je viens de faire, plus le choix, faut faire décembre. »  Que j’avais bien anticip mon état !  La seule motivation qui me reste pour finir décembre est que c’est la seule façon de dire pleinement victoire au Dodécathlon lui-même.  Je donnerai quelques informations là-dessus dans la semaine du 25 novembre quand j’aurais terminé de planifier ce dernier défi. 

Merci encore une fois à tous ceux qui suivent le Dodécathlon et qui par leur considération ou encouragements en font un projet plus que débile, soit enthousiasmant et agréable.