Dodécathlon 20.12

Après 20 ans, maintenant 12 mois, pour 12 défis un peu fous...

vendredi 14 septembre 2012

Échec et math !

Les choses vont vite.  Après le ENDURrun, il aurait peut-être été de mise d'y aller pour une accalmie d'entraînement avant de préparer spécifiquement le défi du mois de septembre.  Pour rappel, ce prochain défi consiste à faire l'ascension (et descente) maximale possible dans une journée.  Mon objectif, un peu arbitraire soit-il dit, est de faire 5000 mètres de dénivelé positif ( D+) (donc 10 000 avec le négatif D±). 

Initialement, le jour J était prévu pour le 22 septembre au Mont Ste-Anne.  Or, en constatant que les heures officielles d'ouverture du parc réduisaient à partir du 4 septembre (sans parler de toutes les activités automnales qui auront lieu sur la montagne à partir de la mi-septembre), je me suis dit qu'il fallait y aller sans attendre.  Autrement dit, au lieu d'aller faire, comme prévu, un entraînement exploratoire ou préparatoire le 2 septembre, j'ai tenté de réussir le défi dès le premier samedi du mois, seulement 14 jours après la fin du ENDURrun. 

Ce fut une expérience enrichissante...et ratée !  Confiant (imbue) de mes capacités après l'ENDURrun, je me disais que même sans être mentalement ou physiquement prêt, j'allais ne faire qu'une bouchée de ce petit défi de septembre.  J'aurais dû me souvenir que Zeus a puni Sisyphe lorsqu'il a tenté de se prendre pour dieu.  Zeuz a condamné le suffisant Sisyphe à monter et descendre en souffrant, sans fin, une montagne tout en poussant inlassablement sa pénible roche.  J'ai bien pensé à lui ce 2 septembre dernier...

J'ai pour la première fois pris conscience de ce dans quoi je m'embarquais pour le défi de septembre en arrivant à Ste-Anne-de-Beaupré.  Lorsque j'ai vu, de loin, en auto, la piste La Gondoleuse par où, en analysant la carte des pistes à partir de mon ordinateur à la maison, je devais monter, je me suis dit: "Ben voyons donc, c'est trop raide ce pente là".  Puis, en arrivant dans le stationnement de la station de ski, à proximité des pentes, au lieu d'un adoucicement de l'impression précédente et de me rassurer sur le degré de difficulté, je compris définitivement que cela allait être exigeant, pour le dire avec euphémisme.  A peine avais-je fait 3 minutes lors de la première ascension que je réalisais que ce n'était pas en 15-20 minutes, comme je le pensais bêtement à partir des cartes, que j'arriverais au sommet.  Il faut dire que j'avais un peu mal calculé la longueur de la piste.  Vous ai-je déjà dit que je n'étais pas finement préparé ?

Avant même la moitié de la première ascension, je savais que 5000m D+ était impossible.  Même en marchant, la pente était exigeante. laborieuse, destructrice pour les muscles.  Et là, je n'avais pas encore appris que la descente le serait à peine moins.  Au total, peu importe par quel chemin je prenais, il me fallait au minimum 1h10 pour faire l'aller-retour de la base au sommet.  A chaque fois, je pouvais additionner 625m de dénivelé positif (en environ 6 km de distance). 

Preuve de l'insuffisance de ma préparation, il m'aura fallu trois ascensions avant de comprendre quel chemin, parmis les options, était le plus approprié (ou plutôt le moins pire).  A la fin de la journée, lorsque j'abdiquai en me disant que j'en avais assez fait compte-tenu de l'infructueux de la tentative, j'en étais à 3125m de dénivelé positif, 6250 avec le D - et tout ça en...31 km et 6h40 (7h00 en incluant les arrêts bouffe).  C'est donc dire que j'ai maintenu une vitesse moyenne légèrement supérieure à 4 km/h.  C'est lent.  Pédestrien comme allure.  Mais, croyez-moi, ce n'est pas parce que je manquais d'ardeur à l'effort. 

Ainsi, le 2 septembre, un brin dépité, je croyais avoir échoué le défi.  Cependant, dans les jours suivants, je me suis quelque peu réconcilié avec l'expérience.  Pourquoi ?  Parce que j'ai fait des maths afin de me rendre compte que, finalement, ce n'était qu'un demi échec.  Je répète que j'ai fait un  6250m D±- en 31 km.  Comparons cela avec quelques épreuves, dites extrêmes, offertes sur la planète:

L'Ultra-Trail du Mont-Blanc (l'UTMB) totalise 9400m D+, répartis sur une disance de 160 km; la Deathrace canadienne fait 5180m D± en 125 km.  C'est donc une pente moyenne de 4% sur l'ensemble de la course.  La D6000, une course soi-disant extrême, fait 6000m D±- en 55 km, donc 11% de pente moyenne.  La mythique Western State fait 6000m D+ en 160km...  La Diagonale des Fous (Ile de la Réunon) fait 9600m D+ en 160km, etc.  Bref, peu importe quelle grande course de trail extrême ou d'ultra-trail on considère, mon effort sur les sentiers du Mont Ste-Anne est en intensité similaire ou davantage.  Il y a déjà de quoi là se réconforter, à tout le moins nuancer l'impression d'échec.

Puis, on peut pousser plus loin la comparaison.  Il existe maintenant une classification des événements de montagne, où plus précisément de Skyrunning.  On considère valide pour l'appelation skymarathon une épreuve dont le dénivelé positif minimal est de 2000m en au moins 30 km (et au plus 42).  A ce compte là, j'ai effectivement fait un difficile skymarathon (3125 D+ en 31 km).  Puis, on retrouve dans la catégorie du skyrunning, l'épreuve extrême qu'est le kilomètre vertical, soit une appelation réservée à une course de 1000m de dénivelé positif en moins de 5 km de distance - autrement dit: avec une pente moyenne minimale de 20%.  Les athlètes qui font un kilomètre vertical (autour de 35 minutes pour les meilleurs), soit en Suisse, en France ou ailleurs dans le monde, ne font en général qu'un seul kilomètre à cette intensité là.  Durant ma tentative de septembre au Mont Ste-Anne, j'ai maintenu une pente moyenne de 21% durant toute la journée.  J'ai donc fait plus de 5 fois un kilomètre vertical !  Oui, je l'avoue, j'ai eu les jambes courbaturées (sans même attendre au lendemain d'ailleurs).

Cette petite analyse comparative de mon résultat ne m'a pas satisfait, mais m'a du moins encourager.  Je tente le coup une seconde fois.  C'est annoncé: le 22 septembre prochain, j'y vais pour 5000 D+ (10 000 D±).  Par contre, je renonce au Mont Ste-Anne (oui il offre un dénivelé intéressant, mais son ascension et sa descente sont trop abrupte si on veut garder le kilométrage bas et en pas perdre du temps inutilement).  Je vais donc tenter le coup plus près de chez moi, dans le modeste Mont Gleason à Tingwick qui, pour sa part, offre tout de même un dénivelé de 190 mètres.  C'est donc dire qu'il me faudra le monter/descendre 27 fois durant la journée.

Je compte lancer le défi tôt le matin afin de maximiser mes chances de finir en peinant le soir s'il m'arrivait de perdre le rythme du début.  J'espère faire l'aller-retour en environ 20 minutes, ce qui me permettrait de monter 600m de dénivelé positif en moins de 1h10.  Ce serait d'une part plus rapide qu'au Mont Ste-Anne, mais surtout moins taxant sur les muscles (notamment durant la descente).  Évidemment, cela me fera faire plus du double en kilométrage.  A tout le moins, ce sera un défi de course (certes lente) et non de marche forcée. 

J'ai déjà (4 jours après "l'échec" du Mont Ste-Anne !) été faire un test de parcours sur le Mont Gleason.  Un ami a été mandaté pour finaliser les tests servant à évaluer le meilleur parcours.  Je serai davantage prêt.  J'ai pu faire des tests d'alimentation lors du Mont Ste-Anne, je me suis mentalement fait une idée précise de l'intensité que 5000 D+ peut représenter.  Je suis presque prêt au moment où on se parle...

En fait, en ce moment, la seule incertitude concerne mon niveau de forme.  Les 12-13 septembre derniers, je "cassais" dans deux entraînements de routine au point d'abréger ceux-ci de moitié. Flat, sans énergie, jambes crevées.  Il faut dire que ça s'explique plutôt bien.  Dans le dernier mois, j'ai fait le ENDURrun, soit 160 km de compétition incluant deux courses natures et un marathon.  Neuf jours plus tard, je faisais un 5km à fond en compétition.  A travers tout ça, je me suis remis à enseigner (stress des début de session et conciliation travail-famille).  Puis, le dernier mois fut aussi des réflexions préoccupantes sur l'avenir du club Kalenjins, des rencontres humainement "drainante" avec les athlètes, de même que la réalisation (petit rush) des plans d'entraînement personnalisés de chacun.  Comme si cela n'était pas assez, j'ai fait durant ce temps six bons entraînements d'intensité à la course.  J'ai aussi intégré un peu plus de musculation dans mon horaire et j'ai attrapé un rhume suite à trois courtes nuits de sommeil.  Faut-il vraiment se surprendre que mon corps ne suive pas ?  

Je vais donc prendre les 10 jours précédents le 22 septembre pour éliminer toute forme d'intensité en entraînement et réduire quelque peu le volume (je roule encore au-dessus de 100km de moyenne depuis la fin du marathon !).  Avec un peu de bons soins, je devrais être correct (pas au top, mais correct) pour attaquer résolu le Mont Gleason.  J'espère la participation de quelques amis coureurs qui m'ont signalé leur soutien potentiel en ce jour d'automne.  On verra.  Si je peux éviter les blessures, je ne sors pas de la montagne avant d'avoir franchi le cap du 5000 D+.